red scare - @Silas Orlov

La soirée était jusque là calme.
Genya et Silas sont assis face à face, rigolent autour d’un verre. Les deux soldats ont l’air presque humains ainsi dévoilés: il y reste donc bel et bien au fond des coeurs noircis. Les langues se délient en même temps que les sourires pour venir tisser une amitié que la scène ne laisse pas présager sanglante. Les fidèles sont deux bêtes en cage, deux tornades au dessus d’une mer pour le moment calme et en cela ils se sont bien trouvés. Ils partagent la même violence, les mêmes ambitions aussi. Se saisir de Newhill pour en faire leur maison. Se débarrasser de toutes ces carcasses de métal.

Et puis, un cri. Un seul. Suivi d’une dizaine d’autres.
Les premiers cris ont à peine annoncé les androïdes que déjà Genya est debout, une main serrée autour de l’arme qui la suit depuis ses jours dans la milice. Les hauts dirigeants de La Main se doutent de l’éventualité d’une riposte des androïdes depuis quelques temps, se sont préparés aussi bien à se battre qu’à mettre le plus de personnes à l’abri. Des innocents seront tués. Genya le sait - tous sont au courant. Il s’agit là d’un sacrifice que Genya s’est préparée à faire depuis bien longtemps. Dieu saura récompenser aussi bien les bergers que les brebis une fois l’heure venue.

« Enfin », alors que son regard glisse jusque Silas - des flammes colériques brûlant à l’arrière de ses yeux noirs. Ce soir, la véritable nature des androïdes sera enfin exposée aux yeux des humains. Des machines, sans coeur et sans âme. Humaines en apparence uniquement. La femme s’efface du visage de Genya, laisse place au monstre divin. La dirigeante des soldats cache sa soif de sang derrière ses traits angéliques, dévoile tout ce qui gronde au fond de ses veines barrées par la haine. Un large sourire carnassier s’étire sur tout le visage de l’Ange macabre lorsqu’elle pose de nouveau les yeux sur Silas - c’est tout autant la meneuse que l’amie qui se régale. Les doigts courent rapidement devant elle, signent la croix au plus près de son coeur avant de se poser sur la croix tatouée derrière son oreille. « Allons-y. »

Les deux terribles déboulent de l’appartement droit sur le chaos. Les androïdes sont descendus en nombre sur la partie de la ville occupée par les humains et semblent bien décidé à laisser le plus de corps derrière eux. Il n’y a aucune hésitation dans les mouvements de la Starkov lorsqu’elle s’élance, féline, entre les fuyards. Genya n’a pas besoin de regarder par dessus son épaule pour savoir que Silas la talonne de près: les deux terribles se sont entraînés ensemble de longues heures durant et l’Orlov fait partie des soldats en qui elle a le plus confiance. Les deux amis se connaissent si bien que leurs mouvements en sont presque coordonnés. Au détour d’un couloir, Genya ralentit le rythme - juste assez que pour glisser quelques mots dans l’oreille du soldat, « Quelle bonne soirée ».