Next to me | Cassie + Lyanna

CASSIE + LYANNA

« Next to me »

Le calme règne en maître à l’infirmerie. Enfin, calme… disons pas d’urgences, pas de traumatologies, pas de chaires à recouvre et pas d’hémorragies à stopper. Mes patients sont stables et j’ai une équipe pour m’aider à tout vérifier. Je n’aime pas ça. Est-ce affreux de souhaiter que quelqu’un se blesse pour que je puisse me servir de mes talents ? Sans me vanter, je pense avoir de l'or dans les doigts, héritage parfait que ma mère m’a laissé. Dans le monde où nous vivons, avoir des connaissances aussi poussées dans la médecine est important, si ce n’est vital. Je crois que c’est ce qui m’a plu en premier. L’humanité repose essentiellement sur notre savoir, sur ce talent. Bien sûr tout le monde contribue à la survie mais sans personne pour soigner, notre population se serait sans doute décimée. C’est sans doute légèrement prétentieux mais j’aime l’idée d’être utile, cela l’aide à tenir dans ce monde de fou. Comment je fais pour me regarder dans la glace alors que j’ai laissé mon frère. Que je n’aie rien fait pour l’aider. Au fond, je savais qu’il était mort. Au fond qu’est-ce que je pouvais faire, mais l’idée que son corps soit aux prises de l’ennemis me torture l’esprit continuellement. Parfois je le vois, il est là tout près dans mes rêves et il me reproche de l’avoir abandonné sur le béton lisse et froid de Newhill. Je me suis jurée de le venger mais est-ce que cette vengeance calmera ma colère ? Ma culpabilité ? Je n’en suis pas moins sûre. On vit tous avec nos démons.

Je quitte le poste d’infirmerie pour me diriger vers l’entrée du camp. Ce camp de fortune ou l’on s’est retranché après l’attaque. Je déteste cet endroit. Il nous ramène à notre pauvre condition, à cette injustice terrible que l’humanité subit. Ce camp est l’exact reflet de ce que l’on est, des ruines. Vestige de l’humanité. Vestige d’une histoire détruite. Nous les Hommes nous sommes bons qu’à la destruction. Je soupire, triste et lasse. Je regarde tristement la vie qui perdure. L’homme est cependant doué, doué pour la survie, l’hiver nucléaire n’a pas eu sa peau, l’exode non plus, je resserre la fourrure que je porte en manteau, mes doigts sont au chaud sous une bonne épaisseur de gants. Mes doigts, bien précieux. Je me dirige vers la frontière entre civilisation abîmée et nature sauvage. Perdue dans mes pensées, je veux voir ma sœur. Parfois c’est un besoin viscéral. Elle me manque. Cette peur constante de la perdre dans cette guerre. Je suis terrorisée rien qu’à l’imaginer, froide, sans vie… morte. Pas elle, elle doit vivre, de nous deux c’est celle qui doit perdurer. J’aime trop son sourire, son éclat de rire, son regard espiègle et curieux et parfois même j’aime l’espoir qu’elle a encore, que moi j’ai perdu.

Je vois le groupe rentrer, je me fige au milieu de ce qui ressemble à une allée. Mes bras sont croisés sur ma poitrine, je les regarde venir à moi, à notre civilisation. Cependant je note rapidement que quelque chose ne va pas. Je froncé les sourires, quelqu’un est tenu, aidé, il y a un blessé… mon cœur s’emballe, je distingue ce qui me fait le plus peur. Cassie. J’avance rapidement vers eux à la hâte. Puis je vois qu’elle est blessée. Sa vie ne semble pas en danger mais c’est ma sœur et cela m’angoisse terriblement. J’arrive elle et celui qui la tient. « - Qu’est-ce qui s’est passé ? Cassie ça va ? » Je prends son visage entre mes mains, je cherche à savoir ce qu’elle a. « - C’est bon, je la tiens, je m’en occupe » je repousse l’aide qu’elle a eu jusque là, trop protectrice sans doute. Je la fais s'asseoir sur le côté et attends qu’elle m’explique.

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Lyanna & Cassiopée

L’expédition avait été longue et éprouvante. Depuis qu’ils vivaient au sein de ce camp de fortune qui leur servait de domicile, la nourriture était moins abondante et moins variée. Cassiopée savait que le rationnement était indispensable pour la survie de tous mais cela lui arrivait fréquemment de ressentir la faim pendant une expédition. Le confort était plus rude que lorsqu’il vivait dans la Ruche ou à Newhill. La jeune femme regrettait parfois le départ de cette ville qui leur avait ouvert les portes, avant de se rappeler que les androïdes étaient responsables. Ils avaient massacré nombreux humains et détruit la vie de nombreuses familles dont la sienne. Cassiopée sentit doucement la rage et la haine grossir en elle alors qu’elle marchait d’un pas vif aux côtés d’autres explorateurs. Le paysage enneigé fut remplacé par un autre, tout aussi glaçant. Une ruelle sombre, des pas dans la neige, une détonation, un corps qui s’effondre. Un cri, son cri qui résonne dans ses oreilles alors qu’elle se précipite vers son frère. Le visage de la déviante, auteure du crime s’impose de nouveau à elle. Elle la voit avec précision, elle pourrait la reconnaitre entre mille. Cassie sentit son sang bouillir et ses poings se fermèrent, contractés.

Totalement ailleurs, Cassiopée ne vit pas la pierre légèrement recouverte par la neige. Elle sentit son pied se tordre et une vive douleur la ramèna à la réalité. « Merde ! » Son cri alerta l’explorateur à côté d’elle qui la rattrapa avant qu’elle ne tombe. Cassie tenta d’appuyer son pied à terre et grimaça de douleur. Elle parvint à prendre appui mais elle devait serrer des dents à chaque pas pour ne pas gémir. Quelle gourde ! Elle savait pourtant qu’elle devait rester vigilante, à chaque instant. « Passe ton bras autour de mes épaules, je vais t’aider. » Cassiopée hocha la tête et s’exécuta. Heureusement, il n’était plus très loin du camp. C’était la première erreur de ce genre pour la jeune femme et elle espérait que celle-ci serait la dernière. La nuit dernière, elle avait peu dormi, les cauchemars l’avaient empêché de de se reposer. La fatigue associée à la faim lui avait fait commettre une erreur de débutante. Elle s’était laissée emportée par ses sentiments et par ses pensées.

Cassiopée vit le camp humain grossir à mesure qu’ils s’approchaient. Elle savait qu’un tour à l’infirmerie s’imposait, elle était incapable de cacher cette foulure. La jeune femme croisa les doigts en espérant que sa sœur ne serait pas dans les parages. Elle ne voulait surtout pas l’inquiéter plus que de raison. Cassiopée connaissait par cœur Lyanna, elle était une vraie mère poule, d’autant plus depuis les évènements récents. La jeune femme comprenait parfaitement qu’elle soit aussi protectrice envers elle, elle ressentait le même besoin de protéger Lyanna. Elles comptaient l’une sur l’autre, indissociable et liée pour la vie.

« Oups… » Cassiopée pouvait reconnaitre cette silhouette entre mille. L’explorateur qui l’aidait depuis plusieurs mètres lâcha un petit rire en suivant son regard. Lyanna s’avança rapidement vers elle, le visage angoissé. La voix inquiète de Lyanna ne trompait pas et ses mains gantées sur son visage fit du bien à Cassiopée. Elle était toujours heureuse de voir sa sœur, même si elle aurait aimé lui cacher ce petit épisode. « ça va, ne t’inquiète pas. Juste une petite foulure de rien du tout. » Lyanna prit la relève de l’explorateur, le dégageant de sa tâche sans ménagement et Cassie ne put s’empêcher de sourire. Elle reconnaissait bien là la petite lionne. Lyanna la fit s’asseoir sur le côté. La jeune femme hésita un instant à la faire marcher et à lui raconter une rencontre imaginaire avec un de ces animaux. Puis elle se ravisa en se disant qu’elle ne trouverait sa blague pas du tout de bon goût et qu’elle pourrait même l’obliger à rester au camp. Cassiopée tenta alors de la rassurer. « Je vais bien Lya. Je me suis juste tordue la cheville droite. J’ai marché sur une pierre et mon pied a dérapé et s’est tordu. Ça va, c’est rien, tu peux relâcher la pression et d’arrêter de froncer les sourcils. Tu vas finir complètement ridée… » Cassiopée comprenait l’inquiétude de sa sœur et elle lui adressa un sourire rassurant. « Mais tu me connais, c’est pas une cheville tordue qui va m’empêcher d’embêter ma sœur. » La jeune femme lui adressa un clin d’œil pour tenter de la détendre. Maintenant qu’elle avait rassuré sa sœur, il n’y avait plus qu’à inspecter cette cheville et Cassie faisait confiance à Lyanna pour lui faire passer un examen minutieux.

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CASSIE + LYANNA

« Next to me »

Cassie c’est tout pour moi. C’est tout ce qu’il me reste. Tout ce que la vie a bien voulu me laisser. Tout ce qu’il me faut pour encore sourire. Je n’imagine pas le monde sans elle. Je n’imaginais pas le monde sans mes parents, sans Daniel. Et pourtant. On croit que la famille est éternelle, que les parents, alors que plus vieux ne mourront jamais. On croit que le grand frère est invincible parce que c’est son rôle, d’être fort et protecteur… et pourtant. La Mort, elle ne prévient pas. Elle n’aime pas lé prévoyance. Elle arrive quand on n’est pas prêt, quand on s’y attend le moins et elle vous vole ce que l’on a de plus précieux. Je croyais en la vie, mais ses sournoiseries nous font douter de tout. Nous faisons peut-être de mauvaises décisions. Pour le moment, je me conforte dans l’idée que mes décisions sont saines, logiques. On doit arrêter le carnage, parfois la paix se gagne au prix de la guerre, du sang. Ma famille a versé trop de sang… mais je suis prête à un dernier sacrifice pour que Cassie puisse espérer encore, voir le monde en paix comme elle le désire. Je suis prête à me sacrifier si j’ai la certitude que les choses vont changer. Elles changeront, elles doivent.

On ne vit plus. Je parle de vie, mais ce n’est plus une vie. On ne fait que survivre, on tente de donner un peu d’ordre à notre société mais la vérité c’est que nous ne sommes plus que le reflet de ce qu’on a pu être. Nous ne sommes plus rien. Nous n’avons plus rien. Des ruines, des cendres. Voilà ce qui nous reste, voilà avec quoi l’on doit se reconstruire. Tant que nous n’auront pas repris les rennes de notre monde, de notre planète, alors rien ne pourra bien se passer. La solution de facilité c’est l’extrémisme. Forcément, cela semble facile, les solutions sont radicales et les promesses semblent si tentantes, on tend le bras, on serre la main et on ne veut plus la lâcher. On y trouve tout de même un petit peu de réconfort. La violence peut devenir une addiction. Véritablement.

Je rode. Je n’aime pas savoir Cassie dehors, dans ce monde hostile. Avant les événements de la Nuit-Rouge, je ne m’inquiétais pas trop, je savais qu’il y avait des risques mais c’était pour la bonne cause. J’ai un peu de mal à comprendre les expéditions. Elles sont risquées avec le nombre de déviants à notre recherche et j’ai peur, peur de la voir souffrir, qu’elle ait mal, peur qu’elle meurt elle aussi. Il est là le souci, toujours le même. Les déviants, les non-déviants aussi. Ils ne nous aiment pas. Ils ne veulent pas partager. Ils ne sont pas des créations divines, ils ne peuvent pas comprendre notre mode de fonctionnement. Comment pourrait-on s’allier à des machines ? Elles nous sont inférieures… Elles ne peuvent pas nous égaler…

Le groupe revient. Je croise mes bras sur ma poitrine. Je soupire. Je suis rassurée de les voir arriver. Cassiopée est dans ce groupe. Je commence à me détendre… Enfin pas pour longtemps. Je remarque rapidement deux individus. L’un s’appuyant sur l’autre. L’autre l’aidant à marcher. Je pourrais reconnaître cette silhouette entre mille. Mon cœur bondit dans ma poitrine. Le groupe arrive à ma hauteur, j’avance, non, je fonce vers ma sœur avec espoir d’avoir des explications. Je vire l’aide, je me fiche de savoir qui l’a emmené jusqu’ici. C’est relativement grossier mais je m’en fiche, ce n’est pas ce qui me préoccupe. Je demande des explications à ma sœur. Elle ne semble pas en danger de mort, je m’en serais aperçue. Je n’entends pas ses premières explications. Je suis trop angoissée pour entendre quoique se soit. Je la laisse prendre appuie sur moi et je la dirige vers l’infirmerie. Je finis par entendre qu’elle a glissé et s’est tordue la cheville. Je fulmine un peu à l’intérieur de moi, elle n’aurait pas dû sortir, cela aurait pu être plus grave. « - On va regarder ça à l’intérieur » Je ne vais pas la déshabiller alors qu’il fait un froid de loup.

Une fois sur place. Je l’installe sur un siège d’auscultation de fortune. Je n’y vois pas très clair, quelques bougies, un brasier de fortune pour nous tenir chaud. Je soupire. « - Je retire ta botte » Je suis assez distante. Je crois qu’indirectement je lui en veux de se mettre en danger de la sorte. Elle essaie pourtant de me faire sourire, mais je ne me déride pas, pas tout de suite. « - C’était stupide. Stupide de sortir, à quoi servent ces excursions ? Tu peux me le dire ? Il y a des déviants qui rodent pour nous faire la peau et toi… toi tu t’amuses à sortir du campement » Je râle, je peste. Je ne pourrais jamais l’empêcher d’être libre. « - Et si vous aviez essuyé une attaque ? Avec ta cheville en vrac, tu aurais fait comment ? » Je ne devrais pas m’emporter, me faire des films, elle est en vie. C’est tout ce qu’il devrait compter. « - On est toutes les deux Cassie, tu dois être plus prudente » Il nous reste mon oncle mais ce n’est pas pareil. Je regarde sa cheville, elle a enflé, légèrement violette. Je sors deux secondes prendre de la neige. « - Il faut que ça dégonfle » Je lui passe la neige sur la cheville. « - Je ne veux pas te perdre toi aussi… » C’est une phrase qui justifie presque ce comportement… enfin j’espère.

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Lyanna & Cassiopée

La ressemblance avec leur mère était flagrante. Lyanna avait hérité de ses cheveux blonds et de son air sérieux quand quelque chose la préoccupait. Si les deux sœurs avaient toutes les deux les yeux bleus, Cassiopée avait quant à elle les cheveux bruns de son père et de son côté avide de liberté. Ses parents lui manquaient énormément, tout comme Daniel, son frère. Cassie se doutait que c’était tout aussi dur pour Lyanna qui se retrouvait responsable de Cassiopée en quelque sorte. Elle était plus âgée et avait un instinct très protecteur. Cela avait toujours été le cas, Lyanna avait souvent été la plus raisonnable et la plus réfléchie. Cassiopée avait toujours fait preuve d’une certaine insouciance, agissant avec son cœur sans toujours réfléchir aux conséquences. Aujourd’hui, elle avait perdu cette insouciance enfantine mais son impulsivité n’avait pas totalement disparue.

Cassiopée suivit sa sœur sans broncher. Elle se doutait qu’elle aurait droit à un sermon. C’était vraiment le manque de chance que Lyanna l’ait ainsi attendu à l’entrée du camp. Elle n’aurait pas pu lui cacher très longtemps sa blessure mais au moins, elle aurait eu le temps de réfléchir à une excuse ou à un léger petit mensonge pour ne pas l’inquiéter. Cassiopée connaissait l’avis de Lyanna sur le fait qu’elle faisait partie des explorateurs. Elle ne partageait pas ce besoin vital de liberté et des grands espaces. Son métier était une vocation pour Cassiopée, comme c’était sans doute le cas pour celui de Lyanna. Elles avaient eu la chance de pouvoir choisir et de faire ce qu’elles aimaient. Dans un monde où tout peut basculer à tout moment, Cassie avait pris l’habitude de chérir les petits plaisirs simples de la vie. La présence de sa sœur et ses explorations en faisait partie.

La jeune femme suivit sa sœur en s’appuyant sur elle afin de ne pas trop s’appuyer sur son pied droit. La douleur était importante mais pas insupportable. Cassiopée priait pour que ce soit qu’une petite foulure et qu’elle puisse rapidement remarcher normalement. Elle ne se voyait pas devoir être alitée pendant plusieurs jours. La jeune femme s’assit sur le siège d’auscultation et laissa Lyanna enlever sa chaussure. Cassiopée tenta de cacher sa grimace de douleur pour ne pas inquiéter sa sœur et tenter de minimiser la blessure. Cassiopée enleva ses gants qu’elle posa sur ses genoux et ouvrit un peu son manteau de fourrure pour se donner une contenance. Lyanna ne réagit pas à ses blagues ni à ses sourires. Cassiopée savait que les foudres de sa sœur n’allaient pas tarder à s’abattre sur elle. Ce qui ne manqua pas.

Cassiopée leva les yeux au ciel lorsque Lyanna se décida enfin à lui parler. « Je m’amuse ? Il faut des explorateurs, comme il faut des médecins. » Cela agaçait légèrement Cassiopée de ne pas être davantage prise au sérieux par sa grande sœur. Sortir n’était pas juste une lubie. Il fallait des explorateurs, leurs connaissances s’étaient révélées inestimables lors de l’Exode. Sans eux, ils avaient peu de chance de s’en sortir vivant. Ils connaissent parfaitement la Terre et ses dangers, ce qu’elle a offrir aussi. « Je ne suis pas seule quand on sort ! Et il y a bien plus dangereux que les déviants. Je te rappelle que nos premiers prédateurs sont et ont toujours été les animaux. C’est pas nouveau que le métier d’explorateur est risqué. » Cassiopée savait qu’elle était injuste de monter le ton contre Lyanna, c’était uniquement de l’inquiétude qu’elle transformait en colère. Cassiopée prit une profonde inspiration pour ne pas s’énerver. La suite des paroles de Lyanna finit par dissiper l’énervement que pouvait ressentir Cassiopée. « Je sais, excuse-moi Lya. Je ferais plus attention la prochaine fois. » Oui, elles n’étaient plus que toutes les deux et il était inenvisageable qu’elles subissent un autre drame. Cassiopée ouvrit la bouche pour lui expliquer que si elle avait dérapé sur une pierre, c’était à cause de ses cauchemars et de la fatigue, mais elle se tût. Elle ne voulait pas de nouveau remuer les souvenirs encore frais de ce qu’elles avaient enduré.

Lyanna sort puis revient avec de la neige pour faire dégonfler sa cheville. Cassiopée hocha sagement la tête et sursauta quand elle sentit le froid contre sa peau nue. Le froid lui picotait la peau mais elle sentait la douleur refluer, sa cheville étant légèrement anesthésiée par le froid. Cassiopée croisa le regard de sa sœur quand elle lui avoua ne pas vouloir la perdre elle-aussi. La jeune femme sentit ses yeux s’humidifier légèrement et elle caressa doucement la joue de Lyanna. « Tu ne me perdras pas. Mais il faut aussi que tu me promettes de faire attention. » Cassiopée leva les yeux et regarda autour d’elle avant de reprendre la parole. « J’ai peur pour toi depuis que tu es rentrée dans la Main. » Cassiopée n’avait jamais franchement abordé le sujet avec sa sœur mais elle tenait là l’occasion de lui dire ce qu’elle en pensait. « Moi aussi, j’ai envie qu’ils payent et je te comprends. Mais il y a quelque chose que je ne sens pas dans cette…organisation. » La Main avait toujours eu une mauvaise réputation et Cassiopée avait peur de ce qu’ils pourraient demander à Lyanna de faire pour eux et pour servir leur cause

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CASSIE + LYANNA

« Next to me »

Cela m’agace. Profondément même. Comment peut-on vouloir sortir à l’extérieur du camp ? Il est là pour nous mettre en sécurité et comment les explorateur peuvent-ils encore vouloir découvrir le monde. On sait à quoi s’en tenir, on sait qu’il y a une immense ville de l’autre côté des collines, on sait tout cela, que demander de plus ? Je n’aime pas savoir Cassie dans la nature, je n’aime pas me dire qu’elle risque sa vie… elle aussi. On ne devrait pas risquer de se perdre, pas encore, on a assez subit. On a perdu la moitié de la famille en arrivant ici, avec l’Exode et tous les événements qui ont suivi. Maintenant on devrait se replier, se protéger. Je ne peux pas protéger ma sœur à l’extérieur du camp. Ce n’est pas l’envie qui me manque de l’accompagner, de la suivre, d’être près d’elle au cas ou. C’était déjà mon désir, accompagner les chasseurs pour pouvoir les sauver sans l’urgence si jamais il y a besoin, on a perdu pas mal d’hommes comme ça, parce que les secours n’étaient pas assez rapides. Seulement le conseil ne laisse pas sortir les médecins, nous avons des savoirs trop précieux, des mains trop agiles, ils ne veulent pas prendre le risque de nous perdre. Alors je suis confinée, je dois attendre et l’attente s’avère bien souvent pénible, longue et inquiétante. Surtout quand on a de la famille de l’autre côté.

Cassie est tout ce qu’il me reste. J’ai beau prendre sur moi, j’ai du mal à la savoir dans la nature. J’ai encore plus de mal quand je la vois revenir appuyée sur un collègue avec une cheville en vrac. Elle aurait pu avoir pire. Ma nerfs lâchent, je sais que je devrais pas la fâcher, qu’elle n’est plus une petite fille mais c’est plus fort que moi.

Je la traîne à l’infirmerie sans cacher mon mécontentement. Elle doit savoir ce que je vis, les angoisses que je subis quand elle est de l’autre côté, elle doit être la plus prudente possible. Une fois dans l’infirmerie, à l’abri des regards, je m’agace réellement. Elle m’apprécie que modérément mes propos, je le sens. Peu importe. Pour elle, il faut des explorateurs, comme il faut des médecins. Je ne suis pas d’accord. « - Non, non, nous savons à quoi nous en tenir pour le moment, sortir du camp est risqué avec les androïdes, les explorations ne sont pas indispensables pour le moment » Je suis dure. J’ai sans doute tort, je le sais, c’est plus fort que moi, je dois lui dire ce que je pense, j’ai toujours été franche, je ne vais pas commencer à lui cacher ce que je ressens. Elle me rappelle cependant que son métier a toujours été dangereux… Je soupire. « - Et bien le risque des déviants rajoute un facteur de plus que le conseil ne semble pas prendre en compte. On devrait mettre en place des stratégie pour aller les anéantir au lieu de prendre des notes sur la topologie » Je place de la glace sur sa cheville, sans être la plus douce possible, je tremble presque à cause de mes nerfs, ce qui fait de moi, à ce moment précis, un mauvais médecin. Je crois que je serais un mauvais médecin s’il devait arriver quelque chose à Cassiopée. Je tente de souffler, de me calmer, élever le ton n’est pas une bonne idée et cela ne réglera rien. Il est hors de question que je me fâche avec elle. J’ai eu peur, voilà tout, elle doit aussi l’entendre. Elle fait un métier risqué et je vais avoir des frayeurs de ce genre fréquemment… Sa cheville doit désenflée. Cassie semble se calmer, s’excuser, promettre de faire plus attention. Je soupire à nouveau. Concentrée sur la glace que j’ai mis tout autant de sa cheville abîmée.

La voix de Cassie est plus douce après mes confessions. Je vois que ça la touche, que ce que n’est pas seulement difficile pour moi, je le sais. Je déglutis, j’ai la gorge serrée, la voir sensible à tout cela m’attriste, me pince le coeur, j’aimerais être plus forte pour elle. Elle caresse ma joue, je détourne le regard, elle risque de me faire pleurer et ce n’est pas le moment, je ne veux pas qu’elle voit cela. Elle me promets de faire attention. Seulement elle aussi, elle aussi elle a peur. « - Ne parle pas de ça ici… on pourrait t’entendre. » Mon coeur s’accélère quand il s’agit de la main, je ne sais pas encore si j’ai fait le bon choix, une part de moi est satisfaite de cet engagement qui pourra m’aider à venger Daniel. « - Ils comprennent, ils savent ce qu’on ressent, ils peuvent nous aider. Les androïdes ne sont pas la volonté de Dieu et tu le sais comme moi, c’est une abomination de l’Homme et on doit arrêter cela. Nos ancêtres se sont battus pour cette religion, cette Terre, on doit en faire autant… et si cela peut m’aider à venger Daniel alors ils sont la réponse. » C’est un discours préparé, que je me force à entendre, à comprendre. Cela me parle, une guerre sainte, la libération de l’humanité, les Hommes qui reprennent leurs droits. Seulement les méthodes ne sont pas celles que j’aurais choisi. Ma voix est cassée légèrement par les émotions, parce que j’ai la gorge serrée. « - Pour le moment, ils sont les seuls à vouloir l’extermination des ces machines… Ils sont les seuls à prendre des mesures radicales... » Je ne la regarde pas quand je parle de la secte. Je soupire, à nouveau. Je regarde un peu sa cheville, moins enflée grâce à la neige. Je sors alors un mélange de plantes, elles forment un baume qui va apaiser l’inflammation. Je masse doucement sa blessure. « - Je ne risque strictement rien… » Mensonge, je le sais. Quand ils m’enverront en mission, je risquerais ma vie. Mais ça, je ne peux pas le lui dire. Je me concentre sur sa cheville, mes doigts la masse tendrement. « - ça devrait aider, ensuite je te ferais un bandage. »

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Lyanna & Cassiopée

C’était souvent ainsi entre les deux sœurs. Elles s’inquiétaient toujours l’une pour l’autre. Ce n’était pas nouveau que Lyanna et Cassiopée avaient des sujets de désaccord. Elles étaient extrêmement soudées, certes, mais elles se chamaillaient souvent en considérant que l’autre était irresponsable. C’était exactement ce qui était en train de se passer. Lyanna reprochait à Cassiopée ses sorties, effectué pour son travail, et Cassiopée reprochait l’entrée de sa sœur dans la secte. Leurs sensibilités étaient amplifiées depuis la mort de leurs parents et de leur frère. Elles avaient toutes deux été complètement impuissantes, incapables de les protéger. Leurs plus grandes peurs étaient ce qui arriveraient à la dernière famille qui leur restait.

Cassiopée pouvait très bien comprendre l’inquiétude de Lyanna mais il fallait qu’elle comprenne que jamais elle ne pourrait l’empêcher de sortir. Peu importe son avis, Cassiopée était faite pour explorer les grands espaces, étudier les lieux alentours. Les informations récoltées étaient indispensables stratégiquement. Depuis quelques temps, Cassiopée avait davantage l’impression que son travail se rapprochait de celui d’éclaireur, vérifant qu’aucun androïde ne trainait par là. L’absence de traces, en dehors des leurs, était toujours rassurante. Alors si, les explorations étaient nécessaires. C’est eux qui donneraient l’alerte s’ils ne se faisaient pas surprendre avant. Mais Cassiopée préférait se mordiller la lèvre pour ne pas révéler toutes ces informations et lui donner confirmer qu’elle était en première ligne.

« La stratégie repose en partie sur la topographie Lya. » La connaissance des lieux entourant le camp humain était indispensable pour s’organiser. La mauvaise foi de Lyanna exaspérait Cassiopée. Argumenter avec une sourde aurait sans doute été plus efficace ! Mais Cassiopée ne lui en voulait pas de s’inquiéter pour elle, elle le comprenait parfaitement. Elle préférait néanmoins détourner le sujet et ne plus être au centre des débats. La jeune femme vit l’angoisse d’être entendu, figer les traits de Lyanna. La Main n’était pas un sujet que l’on abordait avec légèreté. Cassiopée avait entendu beaucoup de choses sur eux, des rumeurs principalement. Elle n’avait jamais su distinguer le vrai du faux. Mais elle avait vu le tatouage de Lyanna, elle avait compris que c’était une sorte de rite de passage. Ce n’était pas grand-chose mais il y avait des chances pour qu’on demande à Lyanna de risquer sa vie au nom d’une guerre Sainte. « Je ne suis pas sûre que ce soit la seule solution. Moi aussi j’ai envie qu’ils payent, que ceux qui ont tué papa et maman ainsi que celle qui a tué Daniel paye. Mais ils ne sont peut-être pas tous comme ça. Chez nous aussi, il y a des meurtriers. Pourtant on ne mérite pas tous de mourir. » La jeune femme se doutait que ces paroles se heurteraient à un mur.

Cassiopée soupira d’aise lorsqu’elle sentit Lyanna appliquer la mixture sur sa cheville. Le froid avait anesthésié la zone et elle avait l’impression que le massage détendait sa cheville. Lyanna insista en disant qu’elle ne risquait rien. « Si c’est le cas, je devrais peut-être y rentrer aussi. » Cassiopée y songeait parfois mais sa décision n’était pas encore prise. Elle les trouvait trop radicaux et elle espérait qu’une entente entre les deux peuples soient encore possibles. Elle voulait que ceux qui avaient tué sa famille paye, mais seulement eux. Mais Cassiopée voulait surtout provoquer sa sœur, analyser sa réaction. Elle se doutait que jamais Lyanna ne voudrait que sa petite sœur prenne des risques.

« Merci Lya », soupira Cassiopée. Elle espérait rapidement se débarrasser de cette entorse et pouvoir à nouveau fouler le sol enneigé à l’extérieur du campement. Les prochains jours passés au camp serait certainement très long… « Dans combien de temps je pourrais de nouveau sortir ? » Il était certain que l’impatience de Cassiopée ne serait pas du goût de Lyanna…

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