Le froid lui mord la peau, écorche chaque partielle de son épiderme qui n'est pas couverte par les épais tissus. Azula traîne des pieds, laisse derrière elle des traces fraîches dans la neige. Personne ne lui accorde d'importance alors qu'elle traverse le camp de fortune des anciens habitants de la Ruche. Son regard est fixé au loin, elle ignore elle aussi les silhouettes qui se dessinent près des bâtiments en ruines. Chacun vaque à ses occupations, effectue les tâches qui lui ont été confiées. C'est comme ça que fonctionne leur société, c'est comme ça qu'elle a toujours fonctionné. Certains pensaient qu'en quittant le bunker les choses seraient différentes, que l'ordre établi allait enfin être bouleversé. Azula savait que ça ne serait pas le cas. Tout est toujours pareil, ou presque. Rien ne changera jamais dans leur société, alors à quoi bon espérer. Ils seront toujours en bas de la pyramide, et eux, toujours en haut. Les forts et les faibles. Leurs vies n'ont aucune valeur par rapport aux leurs, et c'est bien pour ça que c'est à eux d'en faire don. Eux, les gens comme Azula. Ces personnes qui font tourner la société et qui pourtant pourraient disparaître et être remplacés sans grand mal. La jeune femme n'est pas naïve, elle a compris depuis longtemps que cette société tournerait très bien sans elle mais que, malheureusement, l'inverse n'était pas tout aussi vrai. Car même si elle déteste ça, Azula sait qu'elle a besoin de cette communauté pour survivre, encore plus maintenant. Elle a beau être débrouillarde et posséder quelques atouts dans sa main, elle sait que ça ne suffirait pas. Elle sait que si elle partait, les androïdes finiraient par avoir sa peau. Ou peut-être seraient-ce les machines de guerre. Elle ne sait pas ce qui est le mieux, entre les deux. Azula y a réfléchi, à ce scénario. Celui de tout quitter, et de partir loin, loin de tout ça. De quitter cette société dans laquelle elle n'a jamais trouvé sa place. De prendre de la distance avec ces androïdes qui ont brisé sa famille. Mais pour aller où, et pour faire quoi? Elle ne connaît rien du monde, Azula, malgré son statut d'exploratrice. Et c'est bien trop vaste pour elle toute seule, bien trop dangereux pour sa simple personne. Alors elle a abandonné cette idée, parce qu'à quoi bon se torturer avec des rêves qui ne pourront jamais se réaliser. Alors elle se laisse porter par la vie, sans vraiment savoir ce qui l'attend au tournant. Elle ne sait pas vraiment où elle va, quel est son but. Elle n'en a pas, en réalité. Elle ne sait pas non plus pourquoi elle s'accroche avec autant de force. Sûrement qu'il s'agit d'un sacré instinct de survie. Alors, au lieu d'accéder à ses envies d'évasion, Azula fait ce qu'elle peut pour rendre son quotidien un peu moins terne. Elle n'a pas eu besoin de réfléchir longtemps lorsque Lazar lui a proposé de sortir chasser des machines. Elle sait que s'ils réussissent, ils pourront revendre les composantes au marché noir. Malgré le risque de se faire prendre, c'est beaucoup trop tentant pour refuser. Ils n'ont pas le droit de sortir que tous les deux normalement, pas sans le troisième membre de leur équipe, mais avec la guerre qui se profile à l'horizon, certains gardes ferment les yeux sur leurs agissements. On apprécie qu'ils aillent tuer les ennemis qui se tiennent de l'autre côté de ces défenses de fortune, car c'est toujours ça de pris. Lorsqu'elle arrive au niveau de la sortie du camp, Lazar est déjà là. Azula lui sourit, mais sa bouche est cachée derrière le tissu qui lui recouvre la moitié du visage. Elle bouscule son frère, sa manière à elle de le saluer comme s'ils étaient encore des enfants qui chahutaient dans la Ruche. « Allons-y. »